Lucy Darwinn jette un regard faussement ennuyé sur le portrait de Bernardine Dohrn, suspendu au dessus de ma table de chevet. Puis, celle-ci retrouve soudainement une badinerie enfantine qui m'agace légèrement.
"-Un peu démodé, non?
-A quelques choses près, je n'ai rien changé, vous savez..."
Dans le salon, des rires retentissent. Une sorte de toast vient semble-t-il d'être porté. Ce soir, en effet, j'organise un cocktail chez moi. Une soirée quelconque de vendredi soir. Je repense sans raison à Lisa-Lotte. "Nous voici enfin dans la tanière de la bête!" hurle Dieter Zugermann.
Lisa Darwinn me tire par le bras et me murmure "nous sommes embarqués..."
Saturday, December 18, 2004
Tuesday, December 14, 2004
Ce soir, après une longue absence, je retrouve mes congénères dans la salle de réception de l'hôtel Intercontinental. Nous sommes réunis pour le lancement de l'initiative "Solidarité pour les orphelins de Changi", une vente aux enchères organisée par Lucy Darwinn. Celle-ci, me considérant comme un "trend-setter" respecté par la communauté, m'a confié la tâche d'aiguiller les acheteurs potentiels en livrant quelques bon mots sur des oeuvres choisies.
Sur le coup de minuit, je partage une anecdote factice sur la jeunesse de Kanto, sculpteur du cru, avec le un banquier texan récemment retraité. Lucy Darwinn m'adresse un clin d'oeil. Derrière moi, j'entends un couple allemand se souvenir de vacances à Odessa. En rentrant, il me faudra passer un coup de téléphone à ma banque et ne pas oublier de déposer le cadeau d'anniversaire du fils du gardien du parking.
Sur le coup de minuit, je partage une anecdote factice sur la jeunesse de Kanto, sculpteur du cru, avec le un banquier texan récemment retraité. Lucy Darwinn m'adresse un clin d'oeil. Derrière moi, j'entends un couple allemand se souvenir de vacances à Odessa. En rentrant, il me faudra passer un coup de téléphone à ma banque et ne pas oublier de déposer le cadeau d'anniversaire du fils du gardien du parking.
Monday, November 29, 2004
Van Nuys, 1991
The streets just unravel. They have no end. All this thrash. All this culture. Millions like me, lost in this culture. 3AM
Gas and Coke. Millions like me. The streets unfold. Van Nuys.
Left is home and right is home. Green lights, ruby lights. A car crashed here yesterday.
Super discounts. Destroyed my washer. Discount products. With all my free vouchers. Only 3 minutes.
My path leaves no trace. But it is every path. Deep fry me while you can.
And this is the way. Under the bridge and turn right. The BP sign, the ruby light. Angel dust at 3AM. My path has no end.
It is every path.
RW
Friday, November 12, 2004
Ils n'ont pas appelé. J'ai donc préféré sortir traîner à l'aéroport, à Changi, où je débarquai il n'y a pas si longtemps. Assis au bar de l'attrium central, sur-élevé par rapport au terminal des départs, je contemple les quelques derniers voyageurs en route vers des destinations plus lointaines.
Jaïpour, Manille, Houston.
Je pense à tous ceux qui sont morts pour des idéaux révolutionnaires, mais aussi à tout ceux qui ont perdu pied dans un rêve qui n'était pas vraiment le leur. Ceux qui n'ont pas compris à temps qu'ils avancaient sur un échiquier auquel ils n'avaient pas partie prenante. Noyés par les vagues.
Flight OK498 is now ready for boarding.
Jaïpour, Manille, Houston.
Je pense à tous ceux qui sont morts pour des idéaux révolutionnaires, mais aussi à tout ceux qui ont perdu pied dans un rêve qui n'était pas vraiment le leur. Ceux qui n'ont pas compris à temps qu'ils avancaient sur un échiquier auquel ils n'avaient pas partie prenante. Noyés par les vagues.
Flight OK498 is now ready for boarding.
Thursday, November 11, 2004
"You're about to witness the strength of street knowledge"
La pluie torrentielle m'empêche de réellement distinguer quoi que ce soit à travers les fenêtres. Je m'attarde un peu en contemplant la célèbre photo de Bernardine Dohrn lors de son arrestation, accrochée au dessus de ma table de chevet.
A mes pieds, mon nouveau compagnon, un cochon d'Inde dans la fleur de l'âge, se prélasse sur la moquette blanche.
Plus tard, j'attendrai le coup de téléphone des Hollis qui m'inviteront sans doute chez eux ou bien à une virée du côté du port.
A mes pieds, mon nouveau compagnon, un cochon d'Inde dans la fleur de l'âge, se prélasse sur la moquette blanche.
Plus tard, j'attendrai le coup de téléphone des Hollis qui m'inviteront sans doute chez eux ou bien à une virée du côté du port.
Friday, October 22, 2004
Jeudi soir sur Orchard road. Je ressasse quelques souvenirs de Tokyo tout en souriant aux gamins qui se dirigent vers le métro, vers leurs cités dortoirs.
Je suis passé par l'appartement, propre et stérile après la visite de la femme de ménage. J'ai pris une douche, je me suis changé. 'Peter', le concierge de nuit, m'a appelé un taxi. 7 minutes. Le temps d'une cigarette au balcon.
Malgré la pluie et le bruit agaçant des scooters, je me sens conforté. De retour dans cet univers où jamais rien ne se passe, où jamais rien ne m'arrivera. Dans lequel, à l'instant où je repose mon livre et éteins la lumière, tout s'arrêtera.
Je ne suis sans doute qu'un point infime dans un sinueux dédale, mais quand j'éteindrai la lumière, tout s'arrêtera.
Je suis passé par l'appartement, propre et stérile après la visite de la femme de ménage. J'ai pris une douche, je me suis changé. 'Peter', le concierge de nuit, m'a appelé un taxi. 7 minutes. Le temps d'une cigarette au balcon.
Malgré la pluie et le bruit agaçant des scooters, je me sens conforté. De retour dans cet univers où jamais rien ne se passe, où jamais rien ne m'arrivera. Dans lequel, à l'instant où je repose mon livre et éteins la lumière, tout s'arrêtera.
Je ne suis sans doute qu'un point infime dans un sinueux dédale, mais quand j'éteindrai la lumière, tout s'arrêtera.
Sunday, October 17, 2004
5 jours maintenant à Tokyo. Les retrouvailles sont réglées. Je n'ai rien à leur dire, ils n'ont rien à me dire. J'erre dans les "nightclubs" de la ville. Nightclubs. Désuet, non? Clubs de nuit qui m'évoquent quantités d'images, de soirées taquines, sixties style. Presque des souvenirs.
Mais tout ça, ce ne sont que des clichés, n'est ce pas? Les néons et les parapluies, les backrooms enfumées de l'Orient. Plaque tournate où tout s'achète et se vend...
Il est temps de rentrer, je le sais, mais ce séjour est sans doute ma dernière porte de sortie. Je ne la prendrai pas. Non, il est trop tard maintenant.
Mais tout ça, ce ne sont que des clichés, n'est ce pas? Les néons et les parapluies, les backrooms enfumées de l'Orient. Plaque tournate où tout s'achète et se vend...
Il est temps de rentrer, je le sais, mais ce séjour est sans doute ma dernière porte de sortie. Je ne la prendrai pas. Non, il est trop tard maintenant.
Tuesday, October 12, 2004
Assis côté fenêtre de l'avion, je contemple un nuage joufflu dont les gaz distraits me réconfortent quelque peu. Un siège vide me sépare d'une jeune adolescente, perdue dans une musique digitale ou peut-être endormie. Des hommes d'affaire peuplent le reste du boeing presque vide. La lumière filtrée les nimbant me rappelle quelque lever de soleil californien, une de ces veillées dans la Vallée, discutant à l'aube entre apprentis révolutionnaires.
La lumière est douce, donc, mais celle-ci ne parvient pourtant à effacer l'angoisse asphyxiante qui m'habite, ces doutes qu'ont éveillés ce voyage inopiné. Là-bas Tokyo m'attend, mais R.W. lui n'y est plus. Il n'y sera plus.
Après plus de dix années de tergiversation, ce voyage arrive désormais un peu trop tard. Mais au fond, ce n'est pas réellement ça qui aujourd'hui me paralyse. Non. Ce sont les autres. Moi, qu'ai-je fait de ces dix années et que ferai-je des dix prochaines? A quoi riment ces voyages, ce voyage?
Ma jeune voisine semble maintenant s'être réveillée. Du hublot, j'aperçois déjà d'anonymes salariés se noyer dans les échangeurs auto-routiers.
Que leur dirai-je?
La lumière est douce, donc, mais celle-ci ne parvient pourtant à effacer l'angoisse asphyxiante qui m'habite, ces doutes qu'ont éveillés ce voyage inopiné. Là-bas Tokyo m'attend, mais R.W. lui n'y est plus. Il n'y sera plus.
Après plus de dix années de tergiversation, ce voyage arrive désormais un peu trop tard. Mais au fond, ce n'est pas réellement ça qui aujourd'hui me paralyse. Non. Ce sont les autres. Moi, qu'ai-je fait de ces dix années et que ferai-je des dix prochaines? A quoi riment ces voyages, ce voyage?
Ma jeune voisine semble maintenant s'être réveillée. Du hublot, j'aperçois déjà d'anonymes salariés se noyer dans les échangeurs auto-routiers.
Que leur dirai-je?
Friday, October 01, 2004
Après avoir été cloué au lit ces dernières semaines par la dingue, je reprends un peu mes habitudes. Après-midis au bord de la piscine en compagnie de Norah Dawning et sa jeune progéniture, spectacles de mime khmer avec la jeune galleriste canadienne, explorations urbaines en solitaires.
Sous les conseils de mon docteur américain, je passe désormais une grande partie de mon temps dans des bains, tenus pour la plupart par des Libanais, venus faire fortune. Ici se retrouve une communauté moyen-orientale dont je ne soupçonnais pas l'existence. Même si mon oisiveté ne dépareille guère, mon relative détachement me vaut la sollicitude, voire le sarcasme, de mes nouveaux compagnons.
Sans doute, en Asie, moi seul saisit les nuances, illusoires et dérisoires, de ma démarche romantique.
Triste constat.
Sous les conseils de mon docteur américain, je passe désormais une grande partie de mon temps dans des bains, tenus pour la plupart par des Libanais, venus faire fortune. Ici se retrouve une communauté moyen-orientale dont je ne soupçonnais pas l'existence. Même si mon oisiveté ne dépareille guère, mon relative détachement me vaut la sollicitude, voire le sarcasme, de mes nouveaux compagnons.
Sans doute, en Asie, moi seul saisit les nuances, illusoires et dérisoires, de ma démarche romantique.
Triste constat.
Tuesday, September 07, 2004
Derrière moi, dans le salon, le psychédélisme désuet de 'The Church of Anthrax' nimbe de sa douce cacophonie la pièce vide.
Je suis assis sur une chaise en plastique sur le petit balcon de mon appartement. Je fume une cigarette. En portant mon regard vers le bas de l'immeuble, je distingue les faibles lumières des bicoques qui semblent pousser comme de la mousse aux pieds de baobabs de ciment et de verre.
Du balcon, je peux sentir l'odeur de coriandre qui se dégage de l'étage du dessous, d'une cuisine j'imagine, où s'affaire une servante préparant le dîner des maîtres de maison.
Je suis assis sur une chaise en plastique sur le petit balcon de mon appartement. Je fume une cigarette. En portant mon regard vers le bas de l'immeuble, je distingue les faibles lumières des bicoques qui semblent pousser comme de la mousse aux pieds de baobabs de ciment et de verre.
Du balcon, je peux sentir l'odeur de coriandre qui se dégage de l'étage du dessous, d'une cuisine j'imagine, où s'affaire une servante préparant le dîner des maîtres de maison.
Friday, September 03, 2004
Je suis assis à la droite de Lucy Darwinn, la maîtresse de maison, et à la gauche de Philip van Brook. Mademoiselle Darwinn m'a spontanément invité, lors de la réception offerte par l'Ambassadeur du Canada, à ce petit dîner chez elle, entre expatriés. Ne sachant pas exactement ce qui nous lie jusqu'à présent, mis à part un vague commun interêt pour le cinéma thaïlandais, je m'efforce de justifier ma présence par des verbiages plus enjoués qu'à l'accoutumée.
Lucy Darwinn est une jeune divorcée originaire de Toronto, ayant fait le pari "insensé" d'ouvrir une galerie de sculpture contemporaine à Singapour. Après une première année difficile, la galerie semble aujourd'hui avoir trouvé sa clientèle, faite majoritairement de banquiers autochtones en mal de reconnaissance.
La jeune femme semble fascinée, depuis l'autre soir, par mon inactivité et mon exil volontaire dans ce micro-Etat. Pourtant, je lui rétorque, cette inproductivité ne devrait guère être surprenante pour une amie des Arts, dont la charge professionelle reste, de surcroît, fort modérée.
"Mais je suis sûre que vous taisez un projet quelconque.. Un livre? Oui, oui, un livre! Non?
-Non, non, je vous assure. Et puis, vous savez, je ne saurai pas vraiment quoi raconter. Quoi partager."
Celle-ci reste néanmoins persuadée que cette expérience, comme elle la définit, est tout à fait passionnante. Interrompue par notre voisin de table, M. van Brook, s'enquérant de ce en quoi consiste, au juste, cette expérience, Lucy Darwinn dresse un tableau fait d'aliénation urbaine et d'isolement romantique. Van Brook, gérant d'hôtel, opine et renchérit.
"Vous savez, moi, je me suis lancé dans l'hôtellerie par amour pour ces lieux de transit. J'ai toujours eu l'impression que la vie était tellement plus légère, plus pure peut-être, dans un hôtel. Vous voyez ce que je veux dire?
-Oui, très bien, je vois très bien..."
Lucy Darwinn est une jeune divorcée originaire de Toronto, ayant fait le pari "insensé" d'ouvrir une galerie de sculpture contemporaine à Singapour. Après une première année difficile, la galerie semble aujourd'hui avoir trouvé sa clientèle, faite majoritairement de banquiers autochtones en mal de reconnaissance.
La jeune femme semble fascinée, depuis l'autre soir, par mon inactivité et mon exil volontaire dans ce micro-Etat. Pourtant, je lui rétorque, cette inproductivité ne devrait guère être surprenante pour une amie des Arts, dont la charge professionelle reste, de surcroît, fort modérée.
"Mais je suis sûre que vous taisez un projet quelconque.. Un livre? Oui, oui, un livre! Non?
-Non, non, je vous assure. Et puis, vous savez, je ne saurai pas vraiment quoi raconter. Quoi partager."
Celle-ci reste néanmoins persuadée que cette expérience, comme elle la définit, est tout à fait passionnante. Interrompue par notre voisin de table, M. van Brook, s'enquérant de ce en quoi consiste, au juste, cette expérience, Lucy Darwinn dresse un tableau fait d'aliénation urbaine et d'isolement romantique. Van Brook, gérant d'hôtel, opine et renchérit.
"Vous savez, moi, je me suis lancé dans l'hôtellerie par amour pour ces lieux de transit. J'ai toujours eu l'impression que la vie était tellement plus légère, plus pure peut-être, dans un hôtel. Vous voyez ce que je veux dire?
-Oui, très bien, je vois très bien..."
Tuesday, August 31, 2004
Je reprends un canapé au saumon en contemplant les lourds rideaux pourpres qui ornent la salle de réception. Les toilettes chargées des invitées et les costumes quasi victoriens de leurs partenaires confortent l'atmosphère plutôt gothique de la scène. Ce soir l'ambassadeur du Canada reçoit, à l'occasion de la visite de quelque orchestre philharmonique.
J'accompagne en théorie Norah Dawning, voisine de pallier avec qui j'ai eu quelques occasions de bavarder, dans l'ascenceur ou autour de la piscine de notre immeuble. Celle-ci s'est toutefois fondue dans la foule depuis un certain temps.
Un quartet d'étudiants singapouriens tente d'agrémenter la soirée d'airs folkloriques québecois, si j'en crois la femme se tenant derrière moi. "Merveilleux..." Au fond de la salle, je distingue George Blisset, conseiller commercial de l'ambassade américaine, que je suis récemment allé écouter, lors d'un colloque à la Chambre de Commerce.
Une jeune femme s'approche avec hésitation, me salue et me demande si nous ne nous sommes pas rencontrés au cocktail de clôture du Festival du Film Asiatique de Singapour.
"Et alors, que faites vous de vos journées?
-Oh, vous savez, on s'occupe facilement...
-Oui, j'imagine!" Un rire, les yeux se perdent, bref silence. "Comme je vous envie! Une telle liberté!
-Oh, vous savez..."
Près du buffet, Norah Dawning, vraisemblablement ivre, semble raconter une anecdote à un homme âgé. M'apercevant, celle-ci s'arrête brusquement de parler et me salue timidement de la main.
J'accompagne en théorie Norah Dawning, voisine de pallier avec qui j'ai eu quelques occasions de bavarder, dans l'ascenceur ou autour de la piscine de notre immeuble. Celle-ci s'est toutefois fondue dans la foule depuis un certain temps.
Un quartet d'étudiants singapouriens tente d'agrémenter la soirée d'airs folkloriques québecois, si j'en crois la femme se tenant derrière moi. "Merveilleux..." Au fond de la salle, je distingue George Blisset, conseiller commercial de l'ambassade américaine, que je suis récemment allé écouter, lors d'un colloque à la Chambre de Commerce.
Une jeune femme s'approche avec hésitation, me salue et me demande si nous ne nous sommes pas rencontrés au cocktail de clôture du Festival du Film Asiatique de Singapour.
"Et alors, que faites vous de vos journées?
-Oh, vous savez, on s'occupe facilement...
-Oui, j'imagine!" Un rire, les yeux se perdent, bref silence. "Comme je vous envie! Une telle liberté!
-Oh, vous savez..."
Près du buffet, Norah Dawning, vraisemblablement ivre, semble raconter une anecdote à un homme âgé. M'apercevant, celle-ci s'arrête brusquement de parler et me salue timidement de la main.
Tuesday, August 24, 2004
Revenu d'une courte excursion en Malaysie, je me re-acclimate à mon quotidien en dînant, seul, au Mandarin, restaurant situé au dernier étage d'une tour assez clinquante sur Orchard road.
Lieu à la mode, le Mandarin est manifestement apprécié par les expatriés plutôt "long term" et leurs amis cosmopolito-autochtones.
Curieusement, et ce malgré l’affluence, je me suis vu attribuer une des tables les plus prisées, tout à l'angle de la salle rectangulaire, faisant face à un panorama urbain des plus admirable. Seul à table, je fais figure d'exception parmi les groupes voisins, chassant bruyamment la morosité d’un mardi soir. Derrière moi, deux jeunes cabotins francophones se remémorent une récente réunion de lycée à Los Angeles. Je me refreins de me joindre à leur conversation, tout en songeant à cette fête de mariage à Pacific Palissades que je viens de manquer.
D’ici je peux voir les lumières du port, où des ouviers s’affairent même la nuit à souder de la ferraille ou à avaler des soupes aux nouilles, sous le néon blafard de quelque échoppe ambulante. Mon regard se perd dans cette multitude de lumières isolées, lumières dénuées de sens, et progressivement je ne distingue que ma propre réflection dans la vitre qui me fait face.
Lieu à la mode, le Mandarin est manifestement apprécié par les expatriés plutôt "long term" et leurs amis cosmopolito-autochtones.
Curieusement, et ce malgré l’affluence, je me suis vu attribuer une des tables les plus prisées, tout à l'angle de la salle rectangulaire, faisant face à un panorama urbain des plus admirable. Seul à table, je fais figure d'exception parmi les groupes voisins, chassant bruyamment la morosité d’un mardi soir. Derrière moi, deux jeunes cabotins francophones se remémorent une récente réunion de lycée à Los Angeles. Je me refreins de me joindre à leur conversation, tout en songeant à cette fête de mariage à Pacific Palissades que je viens de manquer.
D’ici je peux voir les lumières du port, où des ouviers s’affairent même la nuit à souder de la ferraille ou à avaler des soupes aux nouilles, sous le néon blafard de quelque échoppe ambulante. Mon regard se perd dans cette multitude de lumières isolées, lumières dénuées de sens, et progressivement je ne distingue que ma propre réflection dans la vitre qui me fait face.
Wednesday, August 11, 2004
Je suis assis sur le canapé pendant que le concierge de mon condominium, ainsi que son cousin s'affairent dans ma cuisine, suite à mon appel de tout à l'heure. Ne sachant trop comment les aider à résoudre ce problème de plomberie, je m'efforce de les ignorer aussi naturellement que possible.
Sans doute un peu nerveux, je navigue de chaîne cablée en chaîne cablée, passant du gazouilli juvénil d'un programme musical aux tribulations excitées d'un chef en sueur. J'augmente brusquement le volume du poste. Derrière moi, les deux cousins semblent se disputer.
J'avais prévu de frire quelques calamars.
Sans doute un peu nerveux, je navigue de chaîne cablée en chaîne cablée, passant du gazouilli juvénil d'un programme musical aux tribulations excitées d'un chef en sueur. J'augmente brusquement le volume du poste. Derrière moi, les deux cousins semblent se disputer.
J'avais prévu de frire quelques calamars.
Saturday, August 07, 2004
Broken fingers talk
they grasp at straws
Thougth I heard a voice in there
There's no one there at all
Oh, what have we done
to come to this?
Huddled on some foreign shore
spanning the abyss
Wake up any afternoon
It's so hard to leave the bed
When you look up from the mud
you get kicked right in thr head
Broken fingers talk
They tell us what to do
Guess I'll go out for a walk
It must be after two
Underneath grey Belgian skies
the ground is slick and wet
There must be someplace else to live
I haven't found it yet
they grasp at straws
Thougth I heard a voice in there
There's no one there at all
Oh, what have we done
to come to this?
Huddled on some foreign shore
spanning the abyss
Wake up any afternoon
It's so hard to leave the bed
When you look up from the mud
you get kicked right in thr head
Broken fingers talk
They tell us what to do
Guess I'll go out for a walk
It must be after two
Underneath grey Belgian skies
the ground is slick and wet
There must be someplace else to live
I haven't found it yet
Blaine Reininger "Broken Fingers"
Thursday, August 05, 2004
Mark m'avertit que Norah est susceptible de me brusquer ce soir. J'acquiesce évasivement, ne sachant pas très bien ce qu'il entend par "brusquer". Me faire offense, me ridiculiser?
Nous sommes assis dans le bar recémment refait du St James Club, à l'heure à laquelle la plupart de nos connaissances remontent à leur bureau après leur deuxième café. Mark est agent immobilier et projette de transformer Singapour en lieu de villégiature pour Occidentaux en mal d'exotisme stérilisé. Selon lui, nombre de ses clients délaissent leurs escapades caraïbéennes afin de rechercher, insconsciemment sans doute, le sens du temps. Bref, un ennui esthétique.
Il y voit d'ailleurs le reflet d'une tendance générale de notre société dont la signification m'échappe quelque peu.
Mon propre exil n'est-il donc qu'un symptôme du mal de vivre des villes de l'Occident? Je donne rendez-vous a Mark vers 18h30 ici-même pour que nous allions ensemble à la réception de Norah.
Nous sommes assis dans le bar recémment refait du St James Club, à l'heure à laquelle la plupart de nos connaissances remontent à leur bureau après leur deuxième café. Mark est agent immobilier et projette de transformer Singapour en lieu de villégiature pour Occidentaux en mal d'exotisme stérilisé. Selon lui, nombre de ses clients délaissent leurs escapades caraïbéennes afin de rechercher, insconsciemment sans doute, le sens du temps. Bref, un ennui esthétique.
Il y voit d'ailleurs le reflet d'une tendance générale de notre société dont la signification m'échappe quelque peu.
Mon propre exil n'est-il donc qu'un symptôme du mal de vivre des villes de l'Occident? Je donne rendez-vous a Mark vers 18h30 ici-même pour que nous allions ensemble à la réception de Norah.
Tuesday, July 13, 2004
Depuis quinze jours je m'efforce de passer l'integralite de mes journees dehors. J'erre de marches couverts en lobbies d'hotel, m'efforcant de me vider entierement, de me dissoudre dans le va-et-vient de la ville. Debarrasse de toute volonte propre, je laisse les masses pietonnes me guider, m'amener vers leurs antres commerciales ou leurs cites dortoirs.
Nul ne me regarde. Pendant que je regarde le ciel, j'absorbe les courants d'air qui me traversent. Les gens me bousculent. Je ne parviens guere, a la longue, a distinguer les formes auxquelles j'ai pour le moment confie mon errance.
Au loin, je tente de distinguer une presence qui m'observerait.
Nul ne me regarde. Pendant que je regarde le ciel, j'absorbe les courants d'air qui me traversent. Les gens me bousculent. Je ne parviens guere, a la longue, a distinguer les formes auxquelles j'ai pour le moment confie mon errance.
Au loin, je tente de distinguer une presence qui m'observerait.
Wednesday, June 30, 2004
Je suis assis dans un transat au bord de la piscine en plein air de mon condominium. Celle-ci se trouve à mi-hauteur de la tour, formant une sorte de tremplin vu du sol. Aujourd'hui, comme n'importe quelle autre après-midi de semaine, seuls les enfants, leurs nourrisses et quelques jeunes femmes de loisir, barbotent ou se reposent, selon les goûts.
Je contemple le carton trouvé ce matin dans ma boîte à lettres. Madame et Monsieur Dawning ont le plaisir de m'inviter, ce soir même, à leur "désormais rituel" cocktail de "bon voisinage". Mon agenda fort allegé me permettra sans doute de répondre favorablement à cette invitation. Je balaie du regard les dames langoureusement désoeuvrées qui m'entourent, espérant repérer un regard complice. Mais pourquoi gâcher une si délicieuse surprise?
Je me lève, referme ma chemise et appelle l'ascenseur. Il me faudra tout à l'heure envoyer 'Peter' chercher quelque bouquet exotique.
Je contemple le carton trouvé ce matin dans ma boîte à lettres. Madame et Monsieur Dawning ont le plaisir de m'inviter, ce soir même, à leur "désormais rituel" cocktail de "bon voisinage". Mon agenda fort allegé me permettra sans doute de répondre favorablement à cette invitation. Je balaie du regard les dames langoureusement désoeuvrées qui m'entourent, espérant repérer un regard complice. Mais pourquoi gâcher une si délicieuse surprise?
Je me lève, referme ma chemise et appelle l'ascenseur. Il me faudra tout à l'heure envoyer 'Peter' chercher quelque bouquet exotique.
Monday, June 28, 2004
Mon après-midi s'écoule dans une ruelle populaire du centre ville. Je suis assis devant une petite échoppe ayant installé une table en formica en devanture, sans doute à l'intention du vieux patriarche que j'apercois au fond de la boutique.
Quelques enfants jouent dans l'allée, tout en m'observant, moi et ma Tyger Beer, d'un regard taquin.
Quelques enfants jouent dans l'allée, tout en m'observant, moi et ma Tyger Beer, d'un regard taquin.
Sunday, June 27, 2004
0:22. Orchard Road.
Je suis a present dans un cafe Internet, situe a l'interieur d'un centre commercial ne fermant pas la nuit. La plupart des boutiques sont quant a elles fermees, mais des salles d'arcade et quelques self-services maintiennent une vague activite nocturne.
Alors que trois ou quatre adolescents se livrent a d'ephemeres discussions virtuelles, l'ecran qui me fait face illumine mon visage d'une morne lumiere clinique. Aussi morne que mes pensees, errant confusement en quete d'une idee, d'une quelconque initiative.
Je me resous a naviguer au gre des pages visitees par les adolescents m'ayant precede. L'historique du browser me porte vers les sites de tristes chanteuses taiwanaises. Vers les confessoirs en ligne de lyceens chinois suicidaires. Vers le vide d'une jeunesse de shopping mall.
Tout a l'heure, je rentrerai chez moi en taxi et une fois couche, peut etre reverai-je de A-Mei.
Je suis a present dans un cafe Internet, situe a l'interieur d'un centre commercial ne fermant pas la nuit. La plupart des boutiques sont quant a elles fermees, mais des salles d'arcade et quelques self-services maintiennent une vague activite nocturne.
Alors que trois ou quatre adolescents se livrent a d'ephemeres discussions virtuelles, l'ecran qui me fait face illumine mon visage d'une morne lumiere clinique. Aussi morne que mes pensees, errant confusement en quete d'une idee, d'une quelconque initiative.
Je me resous a naviguer au gre des pages visitees par les adolescents m'ayant precede. L'historique du browser me porte vers les sites de tristes chanteuses taiwanaises. Vers les confessoirs en ligne de lyceens chinois suicidaires. Vers le vide d'une jeunesse de shopping mall.
Tout a l'heure, je rentrerai chez moi en taxi et une fois couche, peut etre reverai-je de A-Mei.
Friday, June 25, 2004
Lenteur.
Aujourd'hui, pour la premiere fois depuis mon arrivee a Singapour, je m'ennuie. Le ciel est couvert, sans pour autant indiquer la perspective d'un orage liberatoire. Je n'ai rien a faire dehors. Je n'ai personne a voir, personne a appeler.
Ici, dans mon salon, meme mes innombrables disques et mes ouvrages socio-culturels des annees 70 ne m'interessent guere.
Que font-ils tous, la-bas, en Europe? Comment parviennent-ils a soutenir ce vide qui m'a force a fuire? Et moi, pourquoi n'en suis-je pas capable?
Qu'importe.
Aujourd'hui, pour la premiere fois depuis mon arrivee a Singapour, je m'ennuie. Le ciel est couvert, sans pour autant indiquer la perspective d'un orage liberatoire. Je n'ai rien a faire dehors. Je n'ai personne a voir, personne a appeler.
Ici, dans mon salon, meme mes innombrables disques et mes ouvrages socio-culturels des annees 70 ne m'interessent guere.
Que font-ils tous, la-bas, en Europe? Comment parviennent-ils a soutenir ce vide qui m'a force a fuire? Et moi, pourquoi n'en suis-je pas capable?
Qu'importe.
Thursday, June 24, 2004
Ce soir, rentrant de mon habituelle errance nocturne, je suis surpris par l'atmosphere festive regnant dans le lobby de mon 'condominium'. Malgre ma pietre allure, trempe par la soudaine averse, je m'aventure vers le patio ou l'ensemble du personnel de l'immeuble celebre quelque anniversaire.
Musique d'ambiance, lampions magiques et boissons petillantes. Tout y est.
Je m'attarde, prend quelques photos, puis rentre chez moi gene, trop conscient de mon statut d'intru.
Musique d'ambiance, lampions magiques et boissons petillantes. Tout y est.
Je m'attarde, prend quelques photos, puis rentre chez moi gene, trop conscient de mon statut d'intru.
Wednesday, June 23, 2004
L’appartement dans lequel je me suis installe voici trois mois se trouve dans une de ces tours en verre dont les megalopoles asiatiques sont si friandes. A l’evidence, ce complexe residentiel cible une clientele occidentale, plutot familiale. La cohorte de concierges, de ‘bell-boys’ et d’agents en uniforme maintiennent une atmosphere conviviale, alliee a une efficacite discrete. Aujourd’hui, dans l’ascenceur, j’entame une soudaine conversation avec une jeune femme Americaine, assez pimpante. Celle-ci me pose les questions d’usage. Nous nous attardons un peu dans le couloir a l’etage auquel nous vivons tous deux, puis nous disons au revoir, a une prochaine fois. Seul dans mon appartement, je me sens quelque peu desouevre, la femme de menage m’ayant deja ote ces taches auxquelles j’eusse pu m’attarder. Pour l’instant, je laisse la television m’hypnotiser quelques minutes, n’ayant pas de projet a proprement parler. Je sais que l’orage ne va pas tarder.
Sunday, June 20, 2004
Je n’ai pour le moment guere fait de rencontres, preferant profiter au mieux de mon isolement tropical. Meme si cette solitude ne me pese pour ainsi dire pas, je n’exclus pas d’etablir prochainement quelques rapports superficiels avec ces expatries dont la raison sociale ne semble pas tres eloignee de la mienne. Alors que mes relations anciennes, grevees de souvenirs, de rancoeurs et d’obligations, me pesaient, ces groupes d’amis de passage, diplomate ou ‘corporate’, me semblent offrir une rafraichissante legerete. Je discuterai alors de quelques ragots entendus la veille, des merites respectifs de mes trois dernieres femmes de menage, tout en narrant quelque souvenir a demi-vrai, a demi-drole. Colliers clinquants, echanges d’adresses. Delicieux diners desoeuvres en ville.
Saturday, June 19, 2004
Mon appartement n’est qu’a quelques metres de l’Hotel Raffles, mais je m’efforce presque tous les jours a venir ici, en debut de soiree, au “cocktail time”, prendre un verre ou deux, voire y diner. C’est a cette heure-ci que je parviens le mieux a savourer ma distance, mon eloignement, et me lancer dans quelque mediation vaseuse sur la douceur de ce vide existentiel. D’ailleurs, c’est mon eternelle fascination pour la decontextualisation propre a la vie d’hotel qui m’a fait choisir pour destination Singapour, symbole a mes yeux de la ville-hotel, aux racines historiques negligeables et a l’exotisme largement sterilise. Merveilleuses series d’avenues enguirlantees et de centres commerciaux…
Friday, June 18, 2004
"Friends for Life"
C'est ainsi que la brochure du club de gym en bas de mon immeuble vante les ramifications sociales du fitness. Oui, des amis pour la vie. Merveilleux.
Mais ce n'est guere ce dont j'ai besoin. Des reperes, des points d'attache pour la vie? Non. Ici, je perds et suis perdu. Sans traces et introuvable.
Ce delicieux polemiste, George Herbert, dit une fois que "vivre sans amis, c'est mourir sans témoin". Peut-etre demanderai-je a 'Peter' d'ajouter cette phrase sur les cartes de visite de fort mauvais gout, et parfaitement inutiles, que j'ai commanditees.
Mais ce n'est guere ce dont j'ai besoin. Des reperes, des points d'attache pour la vie? Non. Ici, je perds et suis perdu. Sans traces et introuvable.
Ce delicieux polemiste, George Herbert, dit une fois que "vivre sans amis, c'est mourir sans témoin". Peut-etre demanderai-je a 'Peter' d'ajouter cette phrase sur les cartes de visite de fort mauvais gout, et parfaitement inutiles, que j'ai commanditees.
Thursday, June 17, 2004
Je m’asseois lentement à une des nombreuses tables vides a la terrasse de l’ancien Hotel Raffles, vestige de marque d’une lointaine époque coloniale. La terrasse est principalement vide, malgré la douceur inhabituelle du temps et le coucher de soleil qui désormais ne saurait tarder. Fidèle au cliché, rappelé avec bienveillance par la carte du bar, je commande un Singapore Sling, inventé à ce qu’il parait par le fondateur de la ville, à qui l’hotel doit d’ailleurs son nom.
A unte table voisine, un couple américain, la trentaine, contemple les fruits d’une session de shopping, mentionnant quelques noms, ceux sans doute des destinataires de certains de ces achats. Moi-même, je me souviens de ces lunettes de soleil Ungaro que j’ai trouvées cet après-midi, les enfile et contemple le ciel, satisfait.
Ici, mon cocktail exotique a la main, je me dis que mes souvenirs européens sont bien loins, mes ambitions et mes rêves aussi. N’était-ce d’ailleurs mon intention lorsque je decidai il y a quelques mois de m’installer ici? Mettre un terme a cette course sans but, abandonnant par la même il est vrai ces hauts et ces bas dont la vie est parait-il faite, preferant prudemment empocher mes quelques gains pour une retraite soi-disant dorée.
Envoutant Hotel Raffles...
A unte table voisine, un couple américain, la trentaine, contemple les fruits d’une session de shopping, mentionnant quelques noms, ceux sans doute des destinataires de certains de ces achats. Moi-même, je me souviens de ces lunettes de soleil Ungaro que j’ai trouvées cet après-midi, les enfile et contemple le ciel, satisfait.
Ici, mon cocktail exotique a la main, je me dis que mes souvenirs européens sont bien loins, mes ambitions et mes rêves aussi. N’était-ce d’ailleurs mon intention lorsque je decidai il y a quelques mois de m’installer ici? Mettre un terme a cette course sans but, abandonnant par la même il est vrai ces hauts et ces bas dont la vie est parait-il faite, preferant prudemment empocher mes quelques gains pour une retraite soi-disant dorée.
Envoutant Hotel Raffles...
Wednesday, June 16, 2004
Delicieux air moite m'impregnant une fois le pied pose sur le bitum de la taxi waiting line.
'Peter', mon chauffeur apprete, sait parfaitement ou se situe l'adresse que je lui indique. A l'arriere de la Lexus, je me laisse aller a quelque reverie, berce que je suis par le defilement d'arides tours de beton.
Eternel retour a l'Intercontinental.
'Peter', mon chauffeur apprete, sait parfaitement ou se situe l'adresse que je lui indique. A l'arriere de la Lexus, je me laisse aller a quelque reverie, berce que je suis par le defilement d'arides tours de beton.
Eternel retour a l'Intercontinental.
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